Origines du coronavirus : Décryptage de la thèse du virus échappé de laboratoire. Loin d’être une vulgaire théorie du complot, un accident de laboratoire pourrait bien être à l’origine du coronavirus causant la Covid-19.
L’équipe chargée de l’investigation sur l’origine du coronavirus se déplaça en chine pour la première fois en janvier 2021. Cette visite s’était déroulée sous l’étroite surveillance des autorités chinoises qui ne brillent pas à l’époque, par leur collaboration. L’équipe en question, mise sur pied par l’OMS, déclara à la fin de la mission qu’il était « hautement improbable » que le virus se soit échappé d’un laboratoire. Trois mois plus tard, le 31 mars 2021, Tedros Ghebreyesus secrétaire générale de l’OMS, provoque la colère de la chine et en décalage avec le premier rapport produit par ses services, soutient une « deuxième phase de l’enquête » qui doit se concentrer sur l’hypothèse d’une fuite accidentelle d’un laboratoire. Même les puissants services de renseignements des États-Unis n’arrivent pas à se mettre d’accord sur l’origine du coronavirus. Un rapport commandé par le président Biden conclut sur le sujet que : « l’infection naturelle par un animal contaminé ou la thèse d’une fuite de laboratoire sont toutes les deux des hypothèses plausibles ». Les médias rapportent à ce sujet que quatre agences américaines jugent probable le scénario d’une contamination naturel homme-animales alors qu’une cinquième agence (le F.B.I) penche plutôt vers l’hypothèse d’une fuite d’un laboratoire. À l’heure où les théories du complot ont si mauvaise presse, comment ce qui est essentiellement un hypothétique complot tournant autour de l’hypothèse de l’accident de laboratoire est parvenu à s’imposer dans les esprits les plus officiels ? Est-ce une machination politiquement motivée des ennemis de la Chine ou bien existe-t-il vraiment un faisceau d’indices scientifiques légitimant de considérer sérieusement l’hypothèse de la fuite du laboratoire ?
Les contradictions de l’institut de virologie de Wuhan
Les scientifiques considèrent généralement que le passage d’un agent pathogène de l’animal à l’homme est la principale voie qu’empruntent les virus pour venir nous tourmenter. C’est la théorie de la Zoonose et elle est largement acceptée. Dans le cas du Sars-cov-2, la chauve-souris est le réservoir désigné de nombre de coronavirus, dont beaucoup, sont très similaires à celui qui nous accable. Cependant, l’hypothèse de la zoonose et donc d’une genèse « naturelle », qui était largement acceptée au début de la pandémie, s’est retrouvée de plus en plus remise en question au profit de la thèse de l’accident de laboratoire. Les premiers clusters de cas liés au marché de Wuhan faisaient de ce marché d’animaux exotiques un coupable idéal renforçant l’idée d’une origine naturelle. Mais de nouvelles données couplées avec le manque de transparence et de coopération de la chine laissent la porte ouverte à toutes les spéculations. Petit à petit, une autre narration s’est mise en place, principalement grâce au courage du collectif DRASTIC acronyme de Decentralized Radical Autonomous Search Team Investigating COVID-19. Et elle commence le 3 février 2020, c’est alors le « deuxième mois » de la pandémie, les chercheurs de ce qui deviendra alors plus tard le suspect numéro 1 : l’institut de virologie de wuhan, publie la description d’un virus qu’ils nommèrent « RATG13 », et qui est identique à 96.2% au virus qui cause la covid-19. Première bizarrerie, et alors que c’est un virus pandémique, les chercheurs se contentent de dire que « RATG13 » a été prélevé sur une chauve-souris de la province de Yunnan. Le manque de détails autour des circonstances du prélèvement est à l’époque frustrant pour bien des observateurs. Six semaines plus tard, une biologiste italienne, Rossana Segreto, découvre en fouillant une base de données génétique que « RATG13 », présenté par l’institut de virologie de Wuhan comme étant un proche cousin du virus actuel, est en réalité un virus bien plus ancien collecté en 2013 dans une mine du Mojiang, baptisé à l’époque « RaBtCoV/4991 ». Loin d’être anodine, cette omission accable particulièrement l’institut de virologie, car la mine du Mojiang a connu en 2012 un accident impliquant des morts de mineurs après avoir contracté ce qu’on a appelé à l’époque le « Mojiang Virus».
La mine du mojiang
Alors qu’ils nettoyaient des excréments de chauve-souris d’une mine du Monjiang, six mineurs âgés de 30 à 63, ont développé une pneumopathie, manifestant une toux persistante, de la fièvre, des maux de tête, des douleurs thoraciques et des difficultés respiratoires. Trois mineurs –les plus âgés- vont en mourir quelques semaines plus tard, les plus jeunes survivront. Bien que les symptômes évoquent une infection typique au coronavirus, la chine et l’institut de Wuhan démentent et soutiennent qu’ils auraient été infectés par un champignon. Cette fois, c’est un compte twitter anonyme @TheSeeker268 qui contredira la version officielle en publiant deux mémoires et une thèse de doctorat qui s’étaient intéressées à l’époque aux cas des mineurs du Mojiang. Les deux mémoires encadrés par l’un des pneumologues les plus réputés de chine, conclut en affirmant que la maladie des mineurs est bien due à un coronavirus contredisant la version de l’institut de Wuhan. Quant à la thèse de doctorat, elle stipule clairement que les mineurs avaient développé des anticorps neutralisants, signe d’une infection de type Sars-cov.
Sars-Cov-2 : Une biologie suspecte
Si les contradictions de la version officielle chinoise nourrissent les soupçons, il faut garder à l’esprit qu’ils ne constituent en rien des preuves de culpabilité de l’institut de virologie de Wuhan. Les virus étant des agents biologiques particulièrement complexes, c’est donc à la science de trancher cette question. Sauf que la nature potentiellement explosive de l’investigation (on parle d’un virus responsable de la mort de 5.8 millions de morts !) rend pour l’instant difficile l’émergence de consensus parmi les scientifiques. Mais une chose est sûre, la théorie de la fuite de laboratoire bien qu’elle ne soit pas prouvée, reste encore très plausible. Et ce n’est pas seulement à cause de l’histoire des mineurs, car la biologie du Sars-cov-2 est elle aussi particulièrement suspecte.
Selon des emails obtenus par Buzzfeed News en janvier 2020, l’expert en transmission des maladies infectieuses Kristian Anderson affirme au Dr Fauci (conseiller de la maison blanche sur la pandémie) que les données du génome du Sars-Cov-2 « sont inconsistantes avec les prédictions de la théorie de l’évolution ». Le scientifique faisait alors référence à deux caractéristiques biologiques principales de ce qui était encore à l’époque le « nouveau » coronavirus : à savoir sa capacité à se lier facilement aux récepteurs humains ACE2 et une autre partie du virus permettant « un clivage par la furine » inconnu jusqu’ici chez les virus de ce type. Ces deux traits déclenchent l’alerte chez nombres de scientifiques qui les trouvent très inhabituels. En effet, ces deux caractéristiques expliquent pourquoi le sars-cov-2 est le seul parmi des milliers de coronavirus existants dans la nature, à être aussi efficace quand il s’agit d’infecter et de rendre malade des humains. Et c’est précisément parce qu’il est aussi optimal que beaucoup pensent qu’il a été optimisé.
Malgré ces premières observations, un groupe de scientifiques emmenés par Peter Daszk (sur lequel on reviendra plus tard) publient une étude extrêmement influente qui sera largement relayée par les médias et dont laquelle ils affirment d’un ton catégorique « Notre analyse démontre clairement que le Sars-Cov-2 n’est pas une construction de laboratoire ou bien un virus manipulé intentionnellement ». Fait curieux, même Kristian Anderson le biologiste qui exprimait en janvier 2020 son étonnement face aux caractéristiques inhabituelles du virus figure parmi les signataires. La théorie de la fuite de laboratoire vient alors d’être étouffée pour la première fois. Un an et 9 mois plus tard, c’est du Laos qu’est venu le second coup (médiatique) asséné jusqu’ici à la thèse de la fuite. Un groupe de scientifiques découvre alors un virus prélevé sur une chauve-souris dans une région « proche » de Wuhan et identique à 99% au Sars-Cov-2. Les coronavirus sont donc encore plus « communs » qu’on ne le pensait, et il devient plus facile de considérer l’origine naturelle surtout que les habitants des régions sont assez friands de la viande de chauves-souris. Le virus découvert au Laos possède aussi des affinités avec les récepteurs humains ACE2, qu’on disait pourtant extrêmement rares, fragilisant la thèse d’un « virus unique donc artificiel ». Scientifiquement, seules l’étrangeté et l’originalité du « site de clivage du furin » permettent alors encore de considérer scientifiquement la thèse de la fuite. Au New yorker, Michael Worobey un biologiste de l’université de l’arizona, qualifia le site de clivage par furine « d’une sauce magique du virus…qu’il soit d’origine naturelle ou bien modifiée génétiquement, c’est ce qui explique pourquoi ce virus circule aussi bien parmi les humains ». Rappelons aussi que le Sars-cov-2 est le seul coronavirus jamais découvert qui possède la capacité de pénétrer les cellules humaines à travers un « clivage par furine ».
La théorie de l’évolution vint aussi entamée la thèse de la fuite du labo: le virus « RATG13 » présentait par la chine comme étant le plus proche cousin du Sars-cov-2 (rappelez-vous, il était devenu le suspect numéro après la communication louche de la chine) est en fait distant du coronavirus qui nous tourmente de plus 1200 mutations, qui correspondent à plusieurs années d’évolution naturelle, certaines sources affirment qu’il faudrait même jusqu’à 100 ans d’évolution naturelle pour que « RATG13 » devienne le virus que nous connaissons actuellement. Autant dire que cette distance génétique entre le coronavirus actuel et le virus de la grotte du mojiang affaiblissait particulièrement la thèse d’une fuite de laboratoire, les deux virus bien qu’étant de proches cousins, s’avèrent finalement suffisamment différents.
« Gain of function »
On aurait pu en rester la, si le collectif DRASTIC n’a pas publié, le 21 septembre 2021, des documents incroyables contenants de nouveaux éléments qui viendront cette fois accentuer la plausibilité de la thèse de laboratoire. Ces documents montrent que des travaux scientifiques périlleux ont été proposés à la très sensible Darpa : U.S. Defense Advanced Research Projects Agency. On y découvre qu’en 2018, Peter Daszk et Shi Zhengli (le scientifique qui contestait violemment la thèse de la fuite et la biologiste en chef du laboratoire de virologie de Wuhan !), ont soumissionné pour des financements destinés à mener des recherches sur l’évolution des coronavirus. Ils y détaillent leur plan : la greffe d’un site « furin clivage » augmentant énormément le pouvoir infectieux de coronavirus afin d’améliorer les connaissances relatives aux virus en prévision d’une « prochaine pandémie ». L’idée générale de Peter Daszk et de Zhengli était d’anticiper l’arrivée de futurs virus pandémique en les générant dans des laboratoires. Les scientifiques espéraient alors que les connaissances acquises pourraient être mises en œuvre pour contrer d’éventuels coronavirus… Mais les financements sont refusés par les fonctionnaires de la DARPA qui jugent trop dangereuses des recherches ayant pour but d’accélérer l’évolution naturelle des virus pathogènes en les manipulant génétiquement afin de créer littéralement des créatures chimériques, taillées sur mesure pour provoquer une pandémie.
Ces documents renseignent donc non seulement sur le potentiel dévastateur des recherches impliquant des manipulations génétiques visant à augmenter la dangerosité des virus, mais ils impliquent aussi deux personnages particulièrement controversés des débats sur l’origine de la pandémie : Peter Daszk et Shi Zhengli, les deux chercheurs à l’origine de la proposition de recherche rejetée. Peter Daszk s’est imposé au début de la pandémie comme le « monsieur origine du virus ». En plus d’être le coordinateur principal de l’étude qualifiant de non-scientifique la thèse de la fuite de laboratoire, il s’est arrangé pour être nommé à la tête d’une équipe d’expert chargé de l’enquête sur l’origine de la pandémie. Pourtant il est maintenant avéré qu’avant le début de la pandémie, Peter Daszk aidait activement la scientifique Shi Zhengli -du laboratoire de Wuhan- à lever des fonds pour mener des expériences visant à recombiner et à améliorer les fonctions pathogènes des coronavirus…Et Alors que de telles circonstances font clairement de lui un « suspect » et ses ramifications avec l’institut de Wuhan sont clairement douteuses, Peter Daszk à rebours des bonnes pratiques déontologiques, n’a jamais déclaré le moindre conflit d’intérêts dans les études qu’il publia et sur lesquelles se sont appuyés nombres de médias et d’experts pour affirmer que seule la thèse de l’origine naturelle est scientifique et que la théorie de la fuite ou de l’accident de laboratoire n’est qu’une vulgaire théorie du complot. Les pratiques, particulièrement controversées, visant à améliorer les virus s’appellent « gain of function » et ils ont été sujets pendant des années à moratoire quand ils ne furent carrément pas mis en pause par l’administration Obama.
Pour conclure, rappelons que les contradictions de l’institut de Wuhan sur l’histoire des mineurs, la biologie du Sars-cov-2, actuellement unique coronavirus connu à ce jour disposant d’un site de « clivage par furine » et les révélations autour des expérimentations visant à manipuler des coronavirus pour les améliorer et les rendre plus efficaces en greffant des sites de « clivage par furine » ne sont que les principaux éléments qui accablent actuellement la Chine et l’ONG Ecohealth de Peter Daszk. Il y’a aussi d’autres éléments plus « secondaires » comme les informations obtenues par les services de renseignements américains rapportant des hospitalisations pour cause de troubles respiratoires de nombre d’employés de l’institut de Wuhan un mois avant le début de la pandémie… Mais malgré l’existence d’un faisceau d’indices et d’une variété de pistes favorables à la thèse de l’accident de laboratoire, la thèse de l’origine naturelle reste malgré tout, encore sur la table, la nature étant elle aussi, parfaitement capable de nous surprendre avec une créature comme le Sars-cov-2.
Source Nymarg ; Bulletin of atomic journal ; Lemonde.