La pénurie des semi-conducteurs qui vient troubler les activités industrielles du monde entier est probablement l’impact économique de la pandémie le plus spectaculaire. La rareté des puces électroniques a fait que la Playstation 5 soit devenue tout d’un coup de plus en plus difficile à trouver et a contraint les constructeurs automobiles à largement réduire leur production. Les analystes chiffrant même à 200 milliards de dollars le manque à gagner pour l’industrie automobile. Des gadgets banals tels que les routeurs, largement disponibles avant l’apparition de la pandémie, sont devenus tout d’un coup très difficile à trouver pour les fournisseurs d’accès internet. Ces pénuries marquent pour la première fois les limites de la mondialisation. À l’origine de ces dérèglements, l’incapacité des producteurs mondiaux de puces électroniques de satisfaire une Demande en appareils électronique bien trop brutale et soudaine.
1 –C’est quoi une puces électroniques?
Elles sont le cerveau de plusieurs diapositifs électroniques. Composés de plusieurs millions –voire de milliards- de transistors qui régulent la circulation du courant, les puces équipent tous les dispositifs électroniques, des plus banals au plus complexes. C’est ainsi qu’on les retrouve dans des réfrigérateurs, des consoles de jeux, des PC, des avions et avec la dynamique des objets connectés, même dans des machines à café !
2- Pourquoi est-t-il si dure de fabriquer des puces électroniques ?
Il faut savoir que les puces de dernière génération sont incroyablement complexes. Elles se composent de milliards de transistors, le tout tenant sur une surface minuscule d’à peine quelques millimètres. Les producteurs de semi-conducteurs opèrent dans des marchés extrêmement concurrentiels ou les lois du Marché sont encore plus impitoyables qu’ailleurs, obligeant les opérateurs à toujours produire des puces toujours plus puissantes. Ajoutés à cela que la production des puces est un métier incroyablement délicat : le processus de production nécessite des quantités astronomiques d’eau et de silicium, et peut être perturbé par un grain de sable, un cheveu ou même un lointain tremblement de terre. Équipée, une usine de production de puces électroniques ne semble pas être une mince affaire non plus et il n’y a qu’a voir les chiffres d’investissement annoncés dans le secteur pour s’en rendre compte. Le président Biden a annoncé une subvention de 52 milliards de dollars pour booster les capacités de production domestique des États-Unis. Une somme que les observateurs jugent insuffisante, face aux 450 milliard de dollar mobilisés sur dix ans par Samsung et les 100 milliards investis sur trois ans par le leader du secteur le Taiwanais TMSC.
3-quels sont les causes de la pénurie des puces électroniques ?
D’abord il y’ a la pandémie de covid-19 et les dérèglements de la chaine d’approvisionnement planétaire causé par une reprise économique soudaine qui ont fait surchauffer les systèmes productifs du monde entier. Mais tout ne s’explique pas que par la pandémie de covid-19. Certains choix stratégiques en matière de management ont aussi contribué aux pénuries actuelles. En effet, avant la pandémie de nombreux constructeurs automobiles ont choisi de minimiser leur stock, travaillant à flux tendu, évitant ainsi des couts liés à l’entreposage. Cette stratégie managériale s’est révélée désastreuse en plein rebond économique ou tous les constructeurs se sont soudain rendu compte qu’ils n’avaient pas de stock de puces électroniques.
Une autre cause de la pénurie actuelle, et le sur- stockage des puces électroniques réalisé par la chine en réponse aux sanctions américaines qui risquaient alors de priver la chine et ses entreprises des précieuses puces. Prévenants, les opérateurs chinois réservèrent massivement en 2020 lesdites puces, siphonnant une bonne partie de la production disponible. C’est ainsi que la chine a importé en 2020 pour 380 milliards de dollars de puces électroniques, soit un cinquième des importations chinoises de l’année.
4- Qui sont les entreprises du secteur ?
Il existe trois types de producteurs de puces électroniques :
Les integrated device manufacturer : Ce sont les acteurs historiques du secteur, ils intègrent en interne les activités de conception et de fabrication. Ils sont l’architecte et le maitre d’ouvrage. Intel, STMelectronics ou encore Renesas compte parmi les grands noms ayant fait le choix d’intégrer toutes les étapes de productions.
Les entreprises de fonderies : Ce sont des entreprises spécialisées uniquement dans la fabrication des puces pour le compte d’autres entreprises disposant préalablement des plans de desseins la puce. Le taïwanais TMSC inaugure ce modèle en 1987.
Les sociétés Fabless : Ce sont des entreprises qui, comme leur nom l’indique, sont dépourvues d’usine de fabrication, se spécialisant ainsi dans la conception et le dessein de la puce, sous-traitant aux fonderies la fabrication. Apple, Nvidia, AMD pour ne citer que ces trois-là font partie de cette catégorie.
4- Comment est organisé le marché des puces électroniques ?
L’entreprise la plus emblématique du secteur est probablement le géant Taïwanais TMSC, qualifié par le journal « Lemonde » comme l’entreprise la plus stratégique de la planète. En 1987, TMSC devient la première fonderie, c’est-à-dire une entreprise spécialisée uniquement dans la fabrication pour d’autres entités- des puces électroniques. Sa stratégie se révélera gagnante, car elle réussira à imposer son modèle, devenant rapidement l’entreprise la plus performante du secteur. Pionnière de la sous-traitance en la matière, elle se cantonne à produire des puces déjà dessinées. C’est ainsi qu’aujourd’hui Apple ou Nvidia dessine et réalise les designs de la puce en interne, pour déléguer ensuite la fabrication en masse à TMSC, la seule entreprise au monde à maitriser le processus de fabrication des puces de dernière génération dotée d’un trait de gravure 5nm qui équipe l’iPhone 13. À l’heure actuelle elle s’accapare 90% du marché des puces hautes gammes et seul Samsung semble avoir la capacité de suivre. Sur le marché des puces moins performantes, dont la gravure dépasse 12 nm, il est dominé par des noms tels que Global Foundries –propriété des Émirats arabes unis depuis 2009-, Micron Technology ou encore STMicroelectronics.
La recherche des profits doublés d’une volonté insatiable de réduction des couts a fait que le monde entier s’est appuyé pendant des années sur le savoir-faire de deux entreprises seulement pour se procurer les puces électroniques de dernière génération : Taiwan Semi Conductor amanufacturing company et la samsung electronic co. Quant aux marchés des puces moins complexes, ils se retrouvent eux aussi bouleversés dans leurs organisations par une combinaison de décisions managériales court-termiste, des tensions géopolitiques entre la chine et les États-Unis et une reprise économique trop soudaine pour les chaines de valeur mondiale. La pandémie covid-19 et son lot de pénurie ont révélé les failles de la mondialisation, reste à savoir combien de temps ces dérèglements dureront.
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