Le chardonneret élégant, appelé stayla ou mukenine au Maroc, est un petit oiseau vif et délicat particulièrement apprécié dans le pourtour méditerranéen pour ses capacités à délivrer des mélodies sublimes et variées laissant une très forte impression chez les connaisseurs.
Son chant est aussi beau qu’audacieux, n’hésitant pas à s’imprégner de son environnement sonore pour explorer un large répertoire qui fait le bonheur des mélomanes-geôliers qui l’enferment dans des petites cages espérant ainsi profiter de son talent. En Afrique du Nord, le chardonneret élégant compte tellement de passionnés qu’il est en danger d’extinction.
Des chercheurs estimaient en 2017, qu’au Maghreb, près de 15.6 millions de chardonnerets élégants étaient enfermés dans des cages dont 6.3 millions rien qu’en Algérie où l’espèce aurait presque disparu. Ca, c’est pour la grande histoire.
La petite histoire est celle des réalités amères de son braconnage et de la domestication forcée et cruelle de ce petit oiseau troubadour. Pour bien la comprendre, il faut savoir que le chardonneret élégant ne se reproduit presque jamais en captivité : il est donc toujours capturé à l’état sauvage puis mis de force dans une cage par des braconniers auxquels la pauvreté a desséché le cœur. Car au final, peu de chardonneret survive à cette épreuve de l’enfermement. Habitué à vivre en liberté, le petit oiseau ne recherche qu’une seul chose après sa mise en cage : fuir sa prison. Ses tentatives ne cessent jamais et font qu’il meurt le plus souvent après sa capture. Les « éleveurs » conseillent généralement de le plonger dans l’obscurité jusqu’à ce qu’il s’habitue à sa cage. Ce conditionnement terrible dure plusieurs mois et beaucoup de chardonneret n’y survivent pas nous confie un amateur.
L’enfermement est donc souvent une épreuve extrêmement traumatisante pour ce petit oiseau habitué à évoluer librement dans la nature. C’est ce traumatisme que nous avons voulu documenter pour vous en nous procurant un chardonneret dans un célèbre Souk de Casablanca. Nous l’avons acheté pour 40dh (moins cher que sa cage qu’on s’est procuré pour 60dh). D’autres chardonnerets se négocient dans les environs de 150dh. Cela sont moins agités car déjà « conditionnés » à supporter la cage après avoir passé plusieurs mois dans la pénombre. Avant de le relâcher, nous avons pris quelques images de cette petite créature qui n’accepte jamais sa mise en cage.
Les connaisseurs savent que la mise en cage initiale est une expérience incroyablement éprouvante pour le chardonneret. Poussé par son instinct de liberté, ce dernier ne cesse ses assauts désespérés contre les barreaux de sa prison que lorsqu’il est maintenu dans le noir le plus complet. A défaut, c’est-à-dire, dés qu’il se retrouve en pleine lumière, l’oiseau reprend ses tentatives qui font qu’il se blesse et s’épuise rapidement pour mourir des suites d’épuisements ou de blessures consécutives à son instinct qui le poussent sans cesse à essayer de se libérer par la force.
Dans cette publication Instagram, vous trouverez vers la fin de la slide, une vidéo témoignant de cet instinct.
Si une poignée de chardonnerets finit par se résigner à l’enfermement après plusieurs mois dans l’obscurité la plus totale, une bonne partie meurent de leur rencontre avec un braconnier ou un amoureux de leurs prestations musicales.